La vie, jours uniformes...
... jours monotones, jours remplis.
[Harry Bernard]
Le stress de l'écran blanc. Des choses à dire : à la pelle. Mais quand il s'agit de les écrire, beaucoup moins.
Parler de tout et de rien, c'est facile, s'ouvrir réellement, ça l'est moins. Et pourtant, il n'est pas nouveau que je refuse de faire des lecteurs de ce blog des psy silencieux et curieux. Quel intérêt après tout ?
Bien entendu, je pourrais faire des lignes et des lignes sur La Poste, le métier de facteur, la robotisation totale et la monotonie qu'il implique. Je pourrais, en effet. Je pourrais, si je souhaitais, vous ennuyer. Si je souhaitais, vous endormir. Dans ce cas-là je mettrais en grand, en MAJUSCULES, en rouge : BLOG À LIRE APRÈS 23h, IDÉAL COMME PETITE HISTOIRE POUR COUCHER LES ENFANTS, " Chroniques d'un facteur au jour le jour. " Ou comment l'ivrogne du 201 a voulu m'agresser pour une lettre. Ou comment les chiens du 14 n'ont pas aboyé ce jour-là. Ou comment la concierge de telle résidence était introuvable. Ou comment... Stop stop, arrêtez-moi.
C'est maladif, c'est chronique, ça te vide le cerveau au point que tu n'arrives plus à l'esquiver, tu rentres chez toi avec une seule chose à l'esprit : tu espères que demain, tu rentreras plus tôt. Triste perspective. Deux mois et trois semaines, cela m'achève d'avance. Chapeau bas à ceux qui font ça tous les jours, des années durant.
C'est prétentieux (et utopique) de ma part, moi qui n'aie même pas encore une licence (félicitations à ceux et celles qui ont eu la leur d'ailleurs), mais j'espère ne pas me retrouver avec un emploi aussi répétitif, aussi peu gratifiant, avec une perspective de monter en grade plus que mince. Quels grades d'ailleurs ? Quel service public aussi ? La Poste ? Non, on ne parle plus de la même chose. C'est une entreprise. C'est privé. C'est commercial. C'est concurrentiel. Si si.
- HELP, ça recommence. Je parle de ÇA, encore. *inspire, expire, inspire, expire*
Soit. Parlons-en une bonne fois pour toute, puis tournons la page, parce que... RAS LE BOL ! Woké. -
[Je rassure tout le monde, c'est la dernière fois que je parle de 'ça' sur ce blog. L'intérêt est totalement limité.]
Imaginez... Imaginons.
[x]
Il fait frais, mais pas trop. Un peu de
vent sur vos bras dénudés, de quoi vous faire
frissonnez légèrement, sans plus. Vous n'avez pas
spécialement envie de vous y rendre, vous y allez quand même.
Vous n'avez guère le choix. C'est triste, oui. C'est comme ça.
On vous a embarqué dans cette affaire sans que vous n'ayez
rien demandé... quoi si, un peu, mais pas tant. Une telle
générosité, c'est trop, vraiment. Pas de marche
arrière possible cependant, à chaque coup de pédale,
vous allez vers l'avant, toujours. A contre-cœur, et non à
contre-sens. Pédaler... pour vous y rendre. Pédaler
encore, par la suite.
C'était comme si on avez posé
un bandeau sur vos yeux, tout est noir, pourtant, il fait déjà
jour. Quasiment 7 heures du matin, en plein été, le
soleil est déjà là pour vous observer. Il compte
vous accompagner longtemps, d'ailleurs. Tout est noir. Le bandeau est
vraiment là ? Vous n'avez même plus envie de le savoir.
Vous vous laissez guider, votre corps est habitué, il vous
entraine sans que vous ayez à réfléchir. A quoi
bon ?
Vous posez pied à terre. Les
gestes se répètent machinalement, puis vous entrez par
la grande porte, à jamais ouverte dans vos souvenirs. Pas
besoin de voir, juste écouter, sentir. La poussière qui
se mêle à la cigarette et à l'odeur du papier,
du courrier. Et le bruit. Les paroles, les machines, les objets, les
lettres qui tombent dans leurs cases, les journaux qui s'empilent,
les caissettes en plastique orange ou gris qui tombent et retombent
et reretombent au sol, une fois vides. Les discussions, rituelles,
elles aussi. On parle de chocolatines, on parle de Marcel, on parle
des "Bon, les recommandés, qu'on s'arrache." Quel
jour sommes-nous ? Hier ? Aujourd'hui ? Les mots sont constamment les
mêmes, à quelques nuances près. Dans les travées
on s'active, de chaque côté des cases, et on brasse le
courrier, qui passe de main en main, inlassablement. On pourrait se
croire sur la jetée, à la criée, tant les voix
criardes de poissonnières se font entendre. Et les blagues
salaces, et les rires gras.
La grosse horloge, fixée bien au
dessus de la haute porte principale, est celle qui donne le 'la', le
top départ, le " équipe 1 (ou 2) vous pouvez
relever ". Comme tout ici, elle semble à jamais figée
dans son cycle infernal. Elle aussi, avance invariablement, aussi
ronde qu'une roue de vélo ou de mobylette, parsemée de
jaune et de bleu foncé.
On tri, telle une machine, dans un
damier vertical aux cases inégales. On tri, on classe, on
regroupe en botte, on prend les recommandés, et 'on
s'arrache'. On pédale, on fait signer, on avise, on distribue,
on pédale toujours, on freine souvent, on se mange les pédales
ou les petites roulettes de devant dans les chevilles, on esquive les
insectes et les plantes encombrantes, on pédale, puis on
revient. On fixe l'heure, continuellement.
Et on finit par rentrer chez soi.
Vous n'aimez pas ce rythme ? Grand bien vous en fasse, demain, ce sera le même.
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Mauss - Je Recherche : Musique
Le voir, et puis c'est tout. : Envie
Léger blues : Humeur
I, Robot ? : Impression